Questioni di genere nelle comunicazioni scientifiche
Mabel Franzone e Orazio Maria Valastro (a cura di)
M@gm@ vol.15 n.3 Settembre-Dicembre 2017
LES FEMMES, SONT-ELLES SOLUBLES DANS LE PRIX NOBEL? : LES INSTITUTIONS, LES LAURÉATES ET LES OUBLIÉES 1901-2016
Carolina Ferrer
ferrer.carolina@uqam.ca
Professeur au Département d’études littéraires de l’Université du Québec à Montréal (UQAM), Canada. Ses recherches portent sur les humanités numériques, les dynamiques culturelles, les aspects sémiotiques des systèmes d’information documentaire. Elle a coédité, avec Lucille Beaudry et Jean-Christian Pleau, Art et politique. La représentation en jeu (Québec: Presses de l’Université du Québec, 2011). Avec Isaac Bazié, elle a coédité Écritures de la réclusion (Québec: Presses de l’Université du Québec, 2015), ainsi que l’anthologie Imaginer la violence. Perspectives Nord-Sud (Québec: Presses de l’Université du Québec, 2015). Elle a aussi publié des articles sur le canon et les prix littéraires, la circulation des concepts, les nouveaux observables de l’ère numérique, les relations entre littérature et cinéma, ainsi que sur l’œuvre de plusieurs auteurs, tels que : Auster, Bolaño, Borges, Brossard, Cortázar, Dorfman, Franz, Manns, Piglia, Thays, Saramago, Volodine.
Vera Rubin (1928-2016) by Amanda Phingbodhipakkiya from design project Beyond Curie |
Errors are notoriously hard to kill,
but an error that ascribes to a man
what was actually the work of a
woman, has more lives than a cat.
Hertha Ayrton, 1909 [1]
En 1992, dans la préface du livre Des femmes prix Nobel, Gidske Anderson affirme : «Ce qui est exaltant ici, c’est qu’on s’intéresse enfin à ce que j’appellerai ‘l’autre moitié’ de l’humanité» [2]. Cependant, les femmes dont les exploits ont été couronnés par le plus important des prix de l’histoire de l’humanité constituent une minorité exigüe. Comme l’établit Isabelle Lévy dans Nobel. 100 ans de prix. 100 ans d’histoires [3], «720 lauréats de 1901 à 2000 dont seulement 30 femmes» [4].
En effet, alors que les femmes constituent approximativement 49,6% de la population mondiale [5], les lauréates du prix Nobel dépassent à peine 5% du nombre total des primés de 1901 à 2016 [6]. Nous nous sommes donc demandés dans quelle mesure, la Fondation Nobel reconnaît-elle la participation des femmes à l’avancement du savoir, à l’enrichissement de la culture et en tant que bâtisseuses de la paix? Plus précisément, quelle place revient aux femmes dans cette «élite transnationale» [7], pour reprendre les termes utilisés par Josepha Laroche pour se référer aux lauréats du prix Nobel?
Sur le site officiel du prix Nobel [8], il y a une section, intitulée Women Who Changed the World [9], dédiée aux femmes qui ont été couronnées depuis la création du prix. Une vidéo de deux minutes présente la photo de chaque lauréate accompagnée d’une phrase qui résume l’importance de son œuvre. Par la suite, il y a une liste exclusivement dédiée aux lauréates [10], où leur nombre y est représenté par des silhouettes féminines que nous reproduisons dans le Tableau n°1 :
A priori, il semblerait que leur présence augmente au fil du temps, en particulier, à partir des années 1960. Il nous semble, cependant, qu’il est nécessaire d’approfondir l’analyse de la représentativité des femmes dans cette élite.
Dans ce but, nous prendrons en considération la structure des prix mise en lumière par Stanley Corngold :
We have discovered that the prize structure is triangular: it involves a prize-giver, a prize-getter, and a prize-coveter –the loser. The more losers, the better. […] There is also a temporal factor –and hence a fourth dimension. […] The prize goes to the prizewinner whose mind meets the minds of the judges on that mountaintop of time [11].
Notre hypothèse de départ, c’est qu’il existe un perdant particulier dans le cas des prix Nobel : le genre féminin. Nous étudierons donc cette situation selon les dimensions établies par Corngold : l’institution qui décerne le prix, les primés et les perdants.
1. Alfred Nobel et les institutions responsables de son héritage
Dans son testament, Alfred Nobel établit les paramètres à utiliser pour distribuer son héritage :En ce qui concerne tout le reste de ma fortune, il convient de procéder de la manière suivante : le capital, réalisé par les liquidateurs en valeurs sûres, devra constituer un fonds dont les intérêts produits chaque année seront attribués à titre de récompense à ceux qui, au cours de l’année écoulée, ont rendu les plus grands services à l’humanité [12].
Une fois déterminées les disciplines qui seront couronnées, il ajoute : «Il est de ma plus ferme volonté que lors des attributions des prix, aucune considération ne soit attachée à la nationalité, afin que le meilleur obtienne le prix, qu’il soit scandinave ou non» [13]. Alfred Nobel établit très clairement que la valeur essentielle pour attribuer chacun des prix est la qualité de l’œuvre du candidat et il n’y est nullement question du genre de la personne.
La responsabilité de la désignation des lauréats repose sur plusieurs institutions, selon la discipline : l’Académie royale suédoise des sciences pour les prix de physique, de chimie et en sciences économiques, l’Assemblée Nobel du Karolinska Institutet pour le prix de physiologie ou médecine, le Comité norvégien du prix Nobel pour le prix de la paix et l’Académie suédoise pour le prix de littérature [14]. Dans le cas du prix en sciences économiques, celui-ci est venu s’ajouter en 1968, alors que le Sveriges Riksbank, la Banque centrale suédoise, a créé le prix en hommage à Alfred Nobel, à l’occasion du 300e anniversaire de la Banque [15]. Cependant, c’est clairement énoncé : «The Prize in Economic Sciences is not a Nobel Prize» [16].
Au sein de chacune des institutions mentionnées ci-dessus est nommé un comité pour chaque prix Nobel [17]. Dans le Tableau n°2, nous pouvons observer la composition par genre des comités pour l’année 2017.
Le seul à montrer une parité par genre, pour l’attribution du prix pour l’année 2017, est le Comité norvégien du prix Nobel de la paix. Dans le cas du Comité du prix Nobel de littérature, cette parité est atteinte si nous ajoutons les membres associés aux membres d’office. Dans les Comités des prix Nobel de physique, de chimie et de physiologie, les femmes représentent seulement 17% des membres. Le Comité du prix Nobel en sciences économiques ne comporte aucune femme pour l’année 2017. Dans leur ensemble, parmi les 36 membres qui constituent ces comités, seulement 25% sont des femmes.
Évidemment, beaucoup d’autres experts participent au complexe processus d’attribution des prix Nobel, selon les règlements des différentes institutions. Néanmoins, il nous semble que le ratio hommes/femmes de ces comités est déjà un indice de la position minoritaire qu’occupent les femmes dans ce milieu. Par ailleurs, nous sommes arrivés à cette conclusion en utilisant seulement les dernières données disponibles. Probablement, si nous pouvions accéder à l’information sur la constitution des institutions dans le passé, nous constaterions que celles-ci étaient encore plus biaisées vers le genre masculin dans le passé.
2. Les lauréates, les lauréats
Par rapport aux lauréats du prix Nobel, nous considérons d’abord les résultats d’une façon globale pour la période 1901-2016 [18]. Toutes disciplines confondues, les femmes représentent seulement 5,4% des 911 lauréats. Le Graphique n°1 nous permet d’observer que les femmes sont une minorité dans toutes les catégories.
En particulier, la présence féminine est absolument marginale dans les sciences : physique 1%, chimie 2,3% et médecine 5,7%. Le prix en sciences économiques, créé en 1968, a été attribué à seulement une femme, ce qui correspond à 1,3% des gagnants.
Le prix de la paix est le seul à être attribué aussi à des institutions. Dans ce cas, les femmes représentent 12,3% des 130 lauréats, dont 26 sont des institutions. La plus grande présence de femmes correspond au prix de littérature où elles constituent 12,4% des lauréats.
Graphique n°1 : Lauréats du prix Nobel 1901-2016 par discipline
Graphique n°2 : Prix Nobel 1901-2016
Par ailleurs, à l’exception du prix de littérature, il est devenu de plus en plus fréquent que le prix soit partagé par deux ou trois personnes ou institutions. Ainsi, même si le nombre de femmes est passé de 4 lauréates dans les années 1901-1920 à 19 pour la période 2001-2016, comme l’indique le Tableau n°1, le nombre total des lauréats a aussi augmenté, comme nous pouvons le constater dans le Graphique n°2.
En effet, les chiffres concernant les lauréates, mis en lumière sur le site officiel du prix Nobel, ne peuvent pas être considérés indépendamment de l’évolution du nombre total de lauréats. Entre 1901 et 2016, pendant 113 ans, au moins un prix Nobel a été décerné. Cependant, dans 76 de ces cérémonies, soit 67% des années, il n’y a pas eu de femme primée. L’année avec la plus haute représentation féminine est 2009 : 38,5% des lauréates. L’absence des femmes est tellement criante, que nous partageons la conclusion à laquelle arrive Marika Hedin dans son étude de 2014 sur les femmes lauréates du prix Nobel :
For some of the women mentioned in this article, one way of presenting them is that they received the Nobel Prize in spite of making the wrong choices and being treated disadvantageously. Perhaps, then, the reflection alluded to in the title of this article should not be why more women have not been awarded with a Nobel prize, but rather, why forty-four female laureates actually have been [19].
Dans ce même ordre d’idées, comme nous le verrons ci-dessous dans l’analyse des oubliées, il existe des cas célèbres de femmes qui ont été nominées à plusieurs reprises sans avoir été reconnues par la Fondation Nobel.
Aussi, il faudrait tenir compte des pourcentages de prix qui sont attribués aux femmes. Selon les dispositions d’Alfred Nobel, chaque prix peut être divisé entre un maximum de trois lauréats. Le Tableau n°3 et le Graphique n°3 correspondent à la somme des parts des prix Nobel reçues par les hommes, les femmes et les institutions. Nous observons que les 49 lauréates ont reçu seulement l’équivalent de 32,92 prix. Cette pratique d’accorder seulement un pourcentage du prix est particulièrement utilisée en sciences.
De cette façon, nous constatons que cumulativement les femmes ont reçu l’équivalent de 0,5 prix en physique et en sciences économiques, respectivement; de 2,83 prix en chimie; de 5,08 prix en médecine. En effet, seulement 3 scientifiques ont reçu la totalité du prix décerné : Marie Curie et Dorothy Crowfoot Hodgkin en chimie et Barbara McClintock en médecine.
Graphique n°3 : Équivalence des parts de prix attribuées
Dans le cas du prix Nobel de la paix, seulement 6 des 16 femmes reçurent 100% du prix : Bertha von Suttner, Mère Teresa, Aung San Suu Kyi, Rigoberta Menchú Tum, Shirin Ebadi et Wanga Muta Maathai. Concernant la littérature, la pratique de diviser le prix est assez inhabituelle et la seule femme à avoir partagé le prix est Nelly Sachs.
Les statistiques montrent clairement qu’il existe un biais très évident vers le genre masculin, et ce, concernant le nombre de lauréats ainsi que le partage des prix entre plusieurs lauréats.
Dans la section suivante, nous approfondissons notre recherche sur la présence féminine par discipline.
3. Les lauréates par discipline
3.1 Le prix Nobel de physique
Comme nous pouvons l’observer, Graphique n°4 et Tableau n°4, à ce jour, seulement 2 femmes ont reçu le prix Nobel de physique : en 1903, Marie Curie, née Sklodowska [20], et, soixante ans plus tard, Maria Goeppert Mayer. La physique constitue ainsi la discipline avec, proportionnellement, la plus basse reconnaissance des femmes : 1%. Marie Curie fut la première femme couronnée par la Fondation Nobel. Dans les deux cas, le prix fut divisé en trois : en 1903, Antoine Henri Becquerel (50%), Pierre Curie (25%) et Marie Curie (25%) ; en 1963, Eugene Paul Wigner (50%), J. Hans D. Jensen (25%) et Maria Goeppert Mayer (25%) [21]. Compte tenu des répartitions des prix, ces deux femmes ensemble ont reçu seulement la moitié d’un prix.
De plus, de nombreux documents indiquent que, initialement, seulement les noms de Becquerel et de Pierre Curie avaient été retenus pour le prix Nobel. En effet, ce serait grâce à l’intervention de Pierre que le travail de son épouse fut aussi récompensé : «On 6 August 1903, Pierre wrote Mittag-Leffler that, if he was being considered for the prize, he wished to be considered with Marie Curie. The physics committee, then, took special steps to include Marie» [22].
Graphique n°4 : Prix Nobel de physique 1901-2016
3.2 Le prix Nobel de chimie
Depuis la création du prix Nobel, l’Académie royale suédoise des sciences a décerné le prix Nobel de chimie à 4 femmes, ce qui correspond à 2,3% des scientifiques primés dans cette discipline, voir Graphique n°5 et Tableau n°5. En 1911, Marie Curie, et en 1964, Dorothy Crowfoot Hodgkin [23], respectivement, reçurent l’intégralité du prix, sans avoir à le partager avec d’autres savants. Marie Curie se transforma ainsi en la première personne à recevoir deux prix Nobel, et ce, en des disciplines différentes. L’année 1935, Irène Joliot-Curie, fille de Pierre et Marie Curie, partagea le prix Nobel avec son collègue et mari, Frédéric Joliot. En 2009, Ada E. Yonath recevait un tiers du prix.
En ce qui concerne l’équivalence, ces prix correspondent à seulement 2,83 parts de prix. Sans l’ombre d’un doute, la chimie constitue aussi une discipline extrêmement biaisée vers les savants masculins.
Graphique n°5 : Prix Nobel de chimie 1901-2016
Dans le livre de Chiu, Gilner et Treagust qui célebre le 100e anniversaire du prix Nobel de chimie de Marie Curie, Anita Hussenius et Kathryn Scantlebury étudient la participation des femmes dans le champ disciplinaire de la chimie. Elles soulignent la contribution que les études féministes pourraient apporter «to engage in the theoretical work to understand why the image of scientist remains stereotypically a chemist,,, a chemist who is male, white, with unruly hair and very heroic» [24].
3.3 Le prix Nobel de médecine ou physiologie
Le prix Nobel de médecine ou physiologie a été décerné à 12 femmes. En observant le Graphique n°6 et le Tableau n°6, nous constatons, dans le cas du prix Nobel de médecine ou physiologie, une augmentation dans le nombre des lauréates à partir des années 1980. Grâce à cette tendance, le pourcentage de femmes primées se situe à 5,7%.
À l’exception de Barbara McClintock qui reçut toute seule le prix en 1983, toutes les autres scientifiques partagèrent le prix, recevant 25%, 33% ou 50% de la récompense. Dans ce sens, les parts de prix attribuées à des femmes en médecine ou physiologie sont de 5,08. Curieusement, tout comme Marie Curie, Gerty Cori partagea le prix avec son mari Carl Ferdinand Cori (25% chacun), tandis que Bernard Houssey reçut 50% du prix. La situation est analogue pour May Britt Moser : elle et son mari, Edvard I. Moser, reçurent 25% chacun, alors que John O’Keefe reçut 50% du prix.
Graphique n°6 : Prix Nobel de médecine ou physiologie 1901-2016
Par ailleurs, malgré la reconnaissance par l’Académie royale des sciences suédoise, la trajectoire de Barbara McClintock continue d’être considérée comme celle d’une savante marginalisée par ses collègues [25].
3.4 Le prix Nobel en sciences économiques
Le Graphique n°7 et le Tableau n°7 correspondent aux données du prix Nobel en sciences économiques de son inauguration, en 1968, à 2016.
Graphique n°7 : Prix Nobel en sciences économiques 1901-2016
Nous constatons que, parmi les 78 lauréats de ce prix, seulement une femme travaillant dans cette discipline a été couronnée à ce jour, ce qui correspond à 1,3% des gagnants. Il s’agit de l’Américaine Elinor Ostrom, qui, en 2009, partagea sa récompense avec Oliver E. Williamson. Avec une formation en sciences politiques et sciences économiques, les recherches d’Ostrom se démarquent par son approche interdisciplinaire [26].
3.5 Le prix Nobel de la paix
Avec 16 lauréates, le prix Nobel de la paix constitue la discipline à avoir reconnu le plus grand nombre de femmes en termes absolus, comme nous pouvons l’observer dans le Graphique n°8 et le Tableau n°8. Le nombre de femmes ayant reçu l’intégralité du prix s’élève à 6. En 1976 et en 2011, le prix fut partagé exclusivement entre des femmes. Ainsi, le nombre de parts de prix de la paix au féminin est de 10,5. En définitive, les femmes sont les récipiendaires de l’équivalent de seulement 10,8% des prix et ne représentent que 12,3% des lauréats.
Par ailleurs, comme le souligne Ronald R. Krebs, «the Peace Prize is the most politicized of the awards, and it, more directly than the others, seeks to change the world through its very conferral» [27]. En effet, ce biais politique s’est accentué avec le temps. Tel que signalé par Hedin, «the shift towards honouring statesmen and politicians rather than persons involved in NGO work has put women at a greater disadvantage, but, it should be noted that they were already under-represented in the first decades of the prize» [28]. En ce sens, rien ne laisse prévoir que, dans le futur, plus de femmes soient susceptibles de recevoir le prix Nobel de la paix.
Graphique n°8 : Prix Nobel de la paix 1901-2016
L’éditeur du prix Nobel de la paix, Øyvind Tønnesson, a répondu à certaines des critiques concernant l’attribution du prix Nobel de la paix à des politiciens et au fait que celle-ci semble interférer dans les affaires de pays étrangers. Cependant, dans cette réponse, il n’est pas question du biais vers les lauréats masculins [29].
Alors que nous observons que la grande majorité des lauréates en sciences est d’origine européenne ou étatsunienne, nous constatons une plus grande diversité parmi les lauréates du prix de la paix : Myanmar, Guatemala, Iran, Kenya, Yémen, Liberia, Pakistan.
3.6 Le prix Nobel de littérature
Entre 1901 et 2016, voir Graphique n°9 et Tableau n°9, le prix Nobel de littérature a été décerné à 14 lauréates, ce qui représente 12,4% des primés.
Graphique n°9 : Prix Nobel de littérature 1901-2016
Puisque ce prix est rarement partagé par plusieurs lauréats, le nombre de parts de prix attribué à des femmes s’élève à 13,5. En effet, la seule écrivaine qui a partagé son prix avec un autre lauréat est Nelly Sachs en 1966. Concernant la distribution géographique de l’origine des écrivaines, elles sont majoritairement européennes (64%).
Comme nous pouvons le constater, il y a d’importantes différences entre les prix Nobel des disciplines scientifiques et ceux de la paix ou de littérature. En particulier, selon plusieurs études, dans le domaine des sciences, il semble avoir une relation significative entre les publications savantes des candidats et la possibilité d’être primé [30]. Dans les cas du prix de littérature et de la paix, cette relation ne présente pas le même type de comportement, car le travail dans ces disciplines ne se traduit pas en publications scientifiques [31]. Par rapport au prix de la paix, comme nous l’avons mentionné, ce dernier est assez étroitement relié aux enjeux politiques.
En 2013, alors que nous avons étudié la réception critique des œuvres des lauréats du prix Nobel de littérature de 1901 à 2012 [32], nous avons constaté, d’une part, que l’impact du prix est très différent dans le monde des lettres que dans celui des sciences et, d’autre part, nous avons observé que l’attribution du prix montre un important biais eurocentrique, malgré l’ouverture vers les autres continents observée dans les dernières années.
En continuité avec ces résultats, nous analysons la bibliographie critique des œuvres des lauréates du prix Nobel de littérature. Ceci nous permet d’observer quelle est la réception de leurs œuvres du point de vue chronologique, géographique et linguistique, ainsi que de percevoir quelle est la place de chaque lauréate au sein de sa littérature nationale. De cette façon, nous pourrons déterminer si l’obtention du prix Nobel s’est traduite ou non par une reconnaissance mondiale ou, tout du moins, locale.
Du point de vue théorique, notre étude se trouve au croisement du concept de champ littéraire [33] et de la scientométrie [34]. Concernant la méthodologie, nous utiliserons la criticométrie [35]. Celle-ci se construit par analogie avec la scientométrie. Alors que cette dernière a pour but la mesure de l’activité scientifique et technologique, la criticométrie a pour but de mesurer l’activité critique en arts, et plus particulièrement en littérature.
Concernant la méthodologie, nous utilisons les métadonnées des documents publiés par la communauté des spécialistes en études littéraires, qui sont répertoriés dans la Modern Language International Bibliography [36] (MLAIB). Cette base de données bibliographiques est la plus importante dans cette discipline. Elle est constituée de plus de 2,5 millions de références et répertorie plus de 4 400 périodiques. Elle contient des articles, des livres, des chapitres de livres et des thèses.
En utilisant le thesaurus de la MLAIB, nous avons obtenu le nombre de références associées à chacune des lauréates du prix Nobel de littérature, voir le Tableau n°10. Aussi, en interrogeant la base MLAIB par rapport aux littératures nationales respectives, nous avons déterminé la place que chaque lauréate y occupe.
Ainsi, nous avons constaté que, malgré le grand nombre de publications sur l’œuvre de Toni Morrison et de Doris Lessing en termes absolus, ces écrivaines n’occupent pas une place centrale dans leur littérature nationale respective. Donc, pour l’analyse chronologique, nous avons choisi d’étudier l’évolution des publications qui portent sur l’œuvre de Gabriela Mistral, de Nadine Gordimer et d’Elfriede Jelinek. Ces écrivaines se situent parmi les 3 premières places de leur littérature nationale, respectivement, et cumulent plus de 500 publications répertoriées dans MLAIB qui correspondent à plus de 5% des références qui portent sur leurs littératures nationales.
Graphique n°10 : Importance de l’écrivaine au sein de la littérature nationale
3.7 Gabriela Mistral
Née en 1889 à Vicuña, Chili, Gabriela Mistral est la première et la seule femme hispano-américaine à avoir reçu le prix Nobel de littérature. Selon les références de la MLAIB, elle est le deuxième auteur le plus étudié de la littérature chilienne, juste après Pablo Neruda, lauréat du prix Nobel de littérature de 1971.
Graphique n°11 : Bibliographie critique sur l’œuvre de Gabriela Mistral
Comme nous pouvons l’observer, Graphique n°11, la série de publications sur l’œuvre de Mistral commence en 1937 et demeure peu nombreuse jusqu’à sa mort en 1957. Cette année-là, le nombre de publications augmente. Cependant, le maximum est atteint en 1989, centenaire de sa naissance. En effet, cet anniversaire sera marqué par de nombreuses publications en son honneur. En particulier, nous retiendrons les numéros de périodiques dédiés à l’œuvre de Gabriela Mistral : Acta Literaria 14 (1989), Atenea 459-460 (1989), Isis International 12 (1989) [37], Taller de Letras 17 (1989).
3.8 Nadine Gordimer
Nadine Gordimer est née à Springs, Afrique du Sud en 1923. Elle est décédée à Johannesburg en 2014. Elle est la seule femme africaine à avoir reçu le prix Nobel de littérature. Son œuvre est la deuxième la plus étudiée en Afrique du Sud, d’après le nombre de publications de la MLAIB, dépassée seulement par les publications sur J. M. Coetzee, lauréat du prix Nobel de littérature de 2003.
Le Graphique n°12 contient la série de publications sur l’œuvre de Gordimer couvrant la période 1964-2016. Jusqu’au milieu des années 1970, il y a très peu de documents.
Graphique n°12 : Bibliographie critique sur l’œuvre de Nadine Gordimer
Nous observons, cependant, une grande augmentation à partir de 1990, année qui marquera le pays par la libération de Nelson Mandela et le début de la fin de l’apartheid. Coïncidence ou non avec le contexte politique sud-africain, cette même année, Rowland Smith publie un livre dédié à l’écrivaine [38]. Cependant, le maximum des publications est atteint en 1993, 70e anniversaire de la naissance de Gordimer. Deux publications sont les principales responsables de ce record, il s’agit, d’une part, du livre The Later Fiction of Nadine Gordimer [39], sous la direction de Bruce King, et, d’autre part, du périodique Bucknell Review 37.1 (1993) [40] qui contient plusieurs articles sur l’œuvre de Gordimer.
Dans les cas de Mistral et de Gordimer, nous confirmons ce que nous avions observé par rapport aux publications critiques sur l’œuvre d’autres lauréats du prix Nobel de littérature : «Dans la plupart des cas, une augmentation dans le nombre de publications critiques est le résultat d’un anniversaire, de naissance, de décès ou de la publication d’une première édition d’un texte» [41].
3.9 Elfriede Jelinek
Née à Mürzzuschlag, Autriche, en 1946, Elfriede Jelinek est couronnée par l’Académie suédoise en 2004. Elle est le seul écrivain autrichien à avoir reçu le prix Nobel de littérature. Selon les publications de la MLAIB, elle est le troisième auteur le plus étudié de son pays, après Thomas Bernhard et Arthur Schnitzler. En observant le Graphique n°13, nous constatons que le maximum annuel de publications est atteint en 2007 et est dû à la publication de deux livres dédiés à l’étude de son œuvre [42].
Graphique n°13 : Bibliographie critique sur l’œuvre d’Elfriede Jelinek
Cependant, il est intéressant de noter qu’il y a, immédiatement après l’annonce du prix Nobel, une augmentation du nombre de publications concernant Jelinek. En effet, la réaction de l’auteure a été polémique, car elle a initialement critiqué le choix de l’Académie suédoise, tel que rapporté par Leland de la Durantaye :
No sooner had Jelinek received notification that she was to be awarded the Nobel prize than she criticized the choice. She was quick to point out, for example, fellow Austrian Peter Handke «would have received the prize as Peter Handke,» but that she was receiving it «as a woman» (prognosticators had indeed predicted a female laureate, though Jelinek lagged far behind Algeria’s Assia Djebar, Denmark’s Inger Christensen, the U. S.’ Joyce Carol Oates and Canada’s Margaret Atwood in the running) [43].
Même si, par la suite, Jelinek a modifié quelque peu ses propos concernant le fait que le prix Nobel lui fut attribué, les controverses sur son attitude ainsi que sur son choix de ne pas voyager à Stockholm pour la cérémonie, mais de livrer son discours d’acceptation par vidéoconférence, ont été le sujet de plusieurs publications depuis 2004.
Étant donné que la vie et l’œuvre de Jelinek sont beaucoup plus récentes que celles de Mistral et de Gordimer, il est probable que, dans le futur, nous observions d’autres maximums dans le nombre de documents publiés, selon les différentes dates où la critique décidera de lui rendre hommage. Ainsi, elle pourrait aussi s’inscrire dans le pattern des trajectoires de publications critiques observé pour d’autres écrivains et qui correspond essentiellement aux anniversaires.
Concernant la langue de publication de la bibliographie critique sur l’œuvre de ces trois auteures, nous constatons que celle-ci demeure majoritairement la langue maternelle de chaque écrivaine, et ce, même après la réception du prix Nobel : Mistral, espagnol 72%, Gordimer, anglais 93%, Jelinek, allemand 50%.
Dans ce même ordre d’idées, dans le Graphique n°14, nous avons représenté la distribution par langue des publications critiques sur l’œuvre des 14 lauréates du prix Nobel de littérature.
Nous constatons que, dans tous les cas, la plupart des textes critiques sont publiés dans la langue maternelle de l’écrivaine. Ceci serait un indicateur de que l’obtention du prix Nobel ne se traduit pas nécessairement par une reconnaissance internationale de la lauréate, tout du moins du point de vue de la critique universitaire.
Graphique n°14 : Publications sur les lauréates par langue
4. Les oubliées
En suivant le raisonnement de Stanley Corngold [44], dans cette dernière section, nous étudions les perdantes ou les oubliées, comme nous avons préféré de les appeler. Une première difficulté est d’identifier qui sont ces personnes. En principe, nous pourrions affirmer que, chaque année, les perdants sont ceux qui ont été nominés pour les différents prix Nobel, mais ne l’ont pas reçu. Cependant, les membres des différents comités et institutions qui ont la responsabilité de décerner les prix Nobel sont tenus de garder un silence absolu sur les noms des personnes et des institutions en lice. Selon les règlements de la Fondation Nobel, il est néanmoins possible de rendre publics les renseignements concernant les nominations qui datent de plus de 50 ans [45]. Actuellement, cette information est disponible pour la période 1901-1966 pour tous les prix, à l’exception du prix Nobel de médecine ou physiologie dont les données sont publiées seulement pour les années 1901 à 1953. Étant donné que le prix Nobel en sciences économiques a été créé en 1968, il n’y a pas de données disponibles sur les nominations pour cette discipline.
Le Graphique n°15 et le Tableau n°11 représentent les nominations par discipline et par genre. Globalement, pour chaque nomination pour une femme il y a 21,7 nominations pour un homme. La discipline la plus biaisée est la médecine ou physiologie avec un ratio de presque 70. Les nominations pour le prix Nobel de la paix sont les moins biaisées, cependant elles demeurent très éloignées de la parité, avec un ratio de 9.
Graphique n°15 : Nombre de nominations aux prix Nobel 1901-1966
La disparité dans le nombre de nominations par genre est tellement importante qu’on pourrait se demander s’il existe une restriction concernant la nomination de femmes aux différents prix. Nous n’avons trouvé aucun règlement à ce sujet. Cependant, nous avions déjà constaté la disparité par genre dans la constitution des comités des prix Nobel pour l’année 2017, tel que compilé dans le Tableau n°2. Par ailleurs, selon les règlements de la Fondation Nobel :
Each year, thousands of members of academies, university professors, scientists, previous Nobel Laureates and members of parliamentary assemblies and others, are asked to submit candidates for the Nobel Prizes for the coming year. These nominators are chosen in such a way that as many countries and universities as possible are represented over time. The nominations for the Nobel Prizes are handled by the Nobel Prize awarding institutions [46].
Ainsi, différentes personnes et institutions peuvent contribuer aux nominations pour les différents prix. Donc, ce que les ratios des nominations hommes/femmes nous indiquent, c’est que la disparité ne se trouve pas seulement au niveau de l’attribution des prix Nobel, mais aussi au niveau des nominations. Dans ce sens, la discrimination que dévoilent ces chiffres est en fait le reflet, non seulement des valeurs de la Fondation Nobel et des académies et des comités qui y sont associés, mais de celles de la société [47].
Un autre aspect que nous avons observé et celui de la réussite des nominations. Le Graphique n°16 représente le nombre de nominations, de nominées et de lauréates par discipline.
Graphique n°16 : Nominations, nominées et lauréates 1901-1966
Nous constatons, encore une fois, que le nombre de nominations et de femmes nominées est beaucoup plus élevé pour les prix Nobel de la paix et de littérature que pour les prix scientifiques. Cependant, le pourcentage de nominées qui deviennent effectivement des lauréates est beaucoup plus élevé dans les sciences, 15,8%, alors que pour le prix de la paix ce pourcentage n’est que de 7,3%, et pour le prix de littérature de 10,2%. Pareillement, le nombre de nominations qui se traduisent en prix est beaucoup plus élevé pour les prix scientifiques, 2,4%, que pour le prix de la paix, 0,8%, ou le prix de littérature, 2,1%. Évidemment, cette situation découle des différents processus de nomination déterminés par les institutions et comités responsables de l’attribution des prix.
4.1 Les oubliées par discipline
Finalement, nous avons consulté la base de données des nominations afin d’étudier la distribution par discipline [48]. Les outils disponibles sur le site permettent de faire des requêtes par type de prix et selon le genre des nominés. Pour chaque prix, nous avons compilé tous les renseignements disponibles pour toutes les femmes nominées depuis 1901 jusqu’à la dernière date disponible [49]. Dans chaque tableau, nous présentons l’année de la première et de la dernière nomination, le nombre de nominations reçues, l’année de naissance et de décès de chaque nominée et, le cas échéant, l’année d’obtention du prix Nobel.
4.1.2 Les nominations pour le prix Nobel de physique
Entre 1901 et 1966, 9 femmes ont été nominées pour le prix Nobel de physique, voir le Tableau n°12, mais seulement 2 d’entre elles l’ont obtenu.
Par ailleurs, comme nous l’avons déjà indiqué, Marie Curie obtint le prix Nobel de physique grâce à l’insistance de son mari, Pierre Curie, avec qui elle partagea la moitié du prix.
4.1.3 Les nominations pour le prix Nobel de chimie
La liste des femmes nominées, entre 1901 et 1966, pour le prix Nobel en chimie contient 13 noms, versus une liste de 3 lauréates, comme indiqué dans le Tableau n°13. Ces renseignements nous permettent de constater que, pendant cette période, 6 femmes ont été nominées pour le prix de physique et le prix de chimie : Marie Curie, Irène Joliot-Curie, Dorothy Crowfoot Hodgkin, Lise Meitner, Marietta Blau et Maria Goeppert Mayer. Tel que signalé ci-dessus, la seule à avoir reçu les deux prix est Marie Curie.
Par ailleurs, Maria Goeppert Mayer et Dorothy Crowfoot Hodgkin ont dû attendre 8 ans, respectivement, entre leur première nomination et l’obtention du prix.
Sans l’ombre d’un doute, le plus important des oublis est celui de Lise Meitner, qui fut nominée 48 fois entre 1924 et 1965, sans jamais être reconnue par la Fondation Nobel. Otto Hahn, avec qui elle travailla de longues années, reçut le prix Nobel de physique en 1944. Ce fait a été étudié et commenté à maintes reprises en histoire et sociologie des sciences:
Injustement, elle [Lise Meitner] n’obtint pas le prix Nobel, décerné à son élève Otto Hahn qui, à l’indignation de Niels Bohr, tenta de minimiser le rôle de Lise Meitner dans la découverte de la fission. Peut-être plus que Marie Curie, elle se heurta à un milieu scientifique encore trop misogyne [50].
4.1.4 Les nominations pour le prix Nobel de médecine ou physiologie
Les données sur les nominations pour le prix Nobel de médecine ou physiologie, Tableau n°14, sont disponibles de 1901 à 1953.
Pendant cette période, 14 femmes furent nominées, mais seulement Gerty T. Cori se retrouva parmi les lauréates. Nous retiendrons spécialement trois cas de nominées non primées : la neurologue Cécile Vogt, l’immunologue Gladys H. Dick et la cardiologue Helen B. Taussig.
Cependant, le nom de la scientifique probablement la plus oubliée en médecine ou physiologie n’apparaît pas sur la liste. Il s’agit de Rosalind Franklin, qui participa à la découverte de la structure de la double hélice de l’ADN [51].
4.1.5 Les nominations pour le prix Nobel de la paix
La liste des femmes nominées pour le prix Nobel de la paix, entre 1901 et 1966, est constituée de 41 noms, Tableaux n°15 et n°16. Immédiatement, nous constatons une différence très importante dans le nombre de femmes nominées pour ce prix par rapport aux prix scientifiques. Il en sera de même pour les nominations pour le prix Nobel de littérature.
Cependant, malgré cet important volume de nominations, seulement 3 femmes ont reçu le prix Nobel de la paix pendant cette période : Bertha von Suttner, Jane Addams et Emily Green Balch.
Il nous semble important de signaler le très grand nombre de nominations reçues par Bertha von Suttner, 101 nominations, ainsi que par Jane Addams, 91 nominations. De plus, dans le cas de cette dernière, 15 années se sont écoulées entre sa première nomination et son couronnement par le Comité norvégien du prix Nobel. Dans le cas de von Suttner, il y a eu, curieusement, 6 nouvelles nominations après son couronnement par la Fondation Nobel. Il doit s’agir, probablement, de nominations afin qu’elle reçoive une deuxième fois le prix Nobel.
Parmi les nominées non primées, nous retiendrons le nom de Margaret Stanger, militante étatsunienne, fondatrice de l’American Birth Control League, qui reçut 31 nominations sur 10 ans.
Lors de notre requête sur les femmes nominées pour le prix Nobel de la paix, le système a signalé 3 organismes : L’Union des femmes de France, avec 5 nominations entre 1902 et 1906; International Council of Women, nominé 2 fois en 1922 et en 1923; Women’s International League for Peace and Freedom, avec 14 nominations de 1955 à 1966. Malgré le fait que ces organismes sont constitués par des femmes, il s’agit d’institutions et, à notre avis, ne devraient pas être considérés comme si des femmes avaient été nominées.
4.1.6 Les nominations pour le prix Nobel de littérature
Entre 1901 et 1966, 59 femmes furent nominées pour le prix Nobel de littérature, voir Tableaux n°17 et n°18. En plus des renseignements obtenus du site officiel du prix Nobel, nous avons interrogé à nouveau la base MLAIB, afin d’extraire le nombre de publications critiques sur l’œuvre de chacune des nominées, information que nous avons ajoutée sur la dernière colonne des tableaux.
Pendant cette période, 6 femmes reçurent le prix Nobel de littérature : Selma Lagerlöf, Grazia Deledda, Sigrid Undset, Pearl Buck, Gabriela Mistral et Nelly Sachs. Parmi les nominées non primées, nous retiendrons 4 écrivaines qui reçurent de nombreuses nominations : Concha Espina de la Serna, Maria Madalena del Martel Patrício, Henriette Charasson et Karen Blixen. Par rapport aux publications sur l’œuvre de ces auteures, nous constatons que, sauf pour Karen Blixen, elles n’ont pas fait l’objet d’un grand volume d’études critiques. Au contraire, certaines écrivaines ne reçurent pas beaucoup de nominations pour le prix, mais de nombreuses publications portent sur leur œuvre : Edith Wharton, Simone de Beauvoir, Ingeborg Bachmann, Katherine Ann Porter, Marguerite Yourcenar.
5. Remarques finales
Dans notre analyse de la place que détiennent les femmes dans l’élite des lauréats des prix Nobel, nous avons confirmé qu’elles sont extrêmement sous-représentées, et ce, à tous les niveaux. Premièrement, au sein des institutions responsables de l’attribution des prix, elles constituent une minorité, spécialement dans les comités scientifiques.
Deuxièmement, les femmes ont reçu une partie infime des prix dans toutes les disciplines, du point de vue du nombre de lauréats, ainsi que par rapport aux parts de prix reçues. Il nous semble inconcevable que «Les femmes qui ont changé le monde» [52], pour reprendre l’expression utilisée dans le site officiel du prix Nobel, ne correspondent qu’à 49 personnes, alors que, pour la même période, 836 hommes et 26 institutions ont été récompensés pour avoir «rendu les plus grands services à l’humanité» [53].
Troisièmement, l’étude des nominations pour les prix nous permet d’affirmer que beaucoup plus d’hommes que de femmes reçoivent des nominations. Cette situation reflète le sexisme qui caractérise non seulement la Fondation Nobel et les institutions qui l’entourent, mais toute la société et, en particulier, le milieu scientifique. Aussi, nous avons observé que le chemin entre la nomination et l’obtention du prix est très ardu, car le taux de transformation est très bas et que l’attente peut s’étirer sur de nombreuses années.
Nous arrivons ainsi à la conclusion, très semblable à celle de Marika Hedin [54], que les 49 lauréates des prix Nobel constituent une exception et que tout reste à faire afin de se rapprocher de la parité hommes/femmes. Il nous semble qu’il est grand temps que la Fondation Nobel abandonne cette posture superficiellement pro-femmes et qu’elle s’attaque véritablement au problème du sexisme qui y règne. Ainsi, il serait urgent d’équilibrer la participation des femmes au sein des comités et des institutions qui attribuent les prix, d’augmenter le nombre de nominations de femmes, d’accroître substantiellement le taux d’attribution de prix aux femmes et de leur octroyer la part des prix qui leur revient. Après tout, la Fondation, en se basant sur les valeurs énoncées par Alfred Nobel dans son testament, devrait jouer un rôle fondamental dans la reconnaissance de la contribution des femmes sur les plans scientifique, culturel et social. Elle devrait, aussi, prendre conscience de son incidence dans l’élaboration de modèles à suivre pour les générations futures et agir en conséquence. Sinon, le prix Nobel restera condamné à n’être que le boys club le plus célèbre de l’humanité.
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Notes
[1] Ayrton, Hertha, «Lettre à l’éditeur», Westminster Gazette, 14 mars 1909. Cette lettre fut la réaction de la mathématicienne britannique Hertha Ayrton à l’éditeur du journal lorsque celui-ci attribua la découverte du radium à Pierre Curie en omettant les travaux de Marie Curie.
[2] Anderson, Gidske. «Préface», Des femmes prix Nobel. De Marie Curie à Aung San Suu Kyi. Charlotte Kerner et Nicole Casanova (dir.) Paris, Antoinette Fouque, 1992, p. 7.
[3] Lévy, Isabelle. Nobel. 100 ans de prix. 100 ans d’histoires. Ville de Sevran, Josette Lyon, 2001.
[4] Op. cit. p. 168.
[5]United Nations, Department of Economic Affairs, Population Division. esa.un.org. 29 avril 2017. Ce ratio est obtenu à partir des estimations de la population pour l’année 2015 effectuées par les Nations Unies : 3 642 266 mille femmes / 7 349 472 mille habitants.
[74] Laroche, Josepha. Les prix Nobel. Sociologie d’une élite transnationale. Montréal, Liber, 2012, p. 159.
[9] «Video Player». Nobelprize.org. Nobel Media AB 2014. Web. 25 Apr 2017. www.nobelprize.org
[10]«Nobel Prize Awarded Women». Nobelprize.org. Nobel Media AB 2014. Web. 25 Apr 2017. https://www.nobelprize.org/nobel_prizes/lists/women.html
[11] Corngold, Stanley. «A Mediation on Prizes», MLN 131.5 (2016): 1258-1275. L’auteur souligne.
[12] Sohlman, Ragnar. L’Héritage d’Alfred Nobel. Le testament à l’origine des prix. Paris : Michel de Maule, 2008, p. 110.
[13] Ibidem.
[14] www.nobelprize.org, Op. cit.
[15] https://www.nobelprize.org/nobel_prizes/economic-sciences/
[16] Ibidem.
[17] Pour plus de précisions sur la composition des différentes institutions, comités du prix Nobel et sur les processus de nomination et de sélection, voir :
The Royal Swedish Academy of Sciences https://www.kva.se/en/startsida
The Nobel Assembly at Karolinska Institutet https://ki.se/en/startpage
The Norwegian Nobel Committee https://www.nobelpeaceprize.org
The Swedish Academy https://www.svenskaakademien.se/en
[18] www.nobelprize.org, Op. cit.
[19] Hedin, Marika. «A Prize for Grumpy Old Men? Reflections on the Lack of Female Nobel Laureates», Gender & History 26.1 (2014): 52-63, p. 62.
[20] Plusieurs publications portent sur la trajectoire scientifique de Marie Curie, notamment par rapport à l’obtention de ses deux prix Nobel, de physique en 1903 et de Chimie en 1911. Voir, par exemple: Pycior, Helena M., «Reaping the Benefits of Collaboration While Avoiding Its Pitfalls: Marie Curie’s Rise to Scientific Prominence», Social Studies of Science 23.2 (1993): 301-323; Macklis, Roger M., «Scientist, Technologist, Proto-Feminist, Superstar», Science 295 (2002): 1647-1648; Pasachoff, Naomi, «The Many Lives of Marie Curie», Metascience 14 (2005): 377-389; Trombetta, Mark, «Madame Maria Sklodowska-Curie –brilliant scientist, humanitarian, humble hero: Poland’s gift to the World», Journal of Contemporary Brachytherapy 6.3 (2014): 297-299. Il existe aussi de nombreuses biographies sur la savante, telles que : Chiu, M.-H., P. J. Gilmer and D. F. Treagust (eds.), Celebrating the 100th Anniversary of Madame Marie Sklodowska Curie’s Nobel Prize in Chemistry, Rotterdam, Sense Publishers, 2011; Curie, Ève, Madame Curie, Paris, Hachette, 1946 ; Henry, Natacha, Les sœurs savantes, Paris, Vuibert, 2015 ; Quinn, Susan, Marie Curie, A Life, New York, Simon and Schuster, 1995 ; Reid, Robert William, Marie Curie derrière la légende, Paris, Seuil, 1983.
[21] Maria Goeppert Mayer était aussi mariée à un physicien, Joseph Mayer. Su la vie de cette scientifique, voir : Johnson, Karen E., «Science at the Breakfast Table», Physics in Perspective 1 (1999) : 22-34; Johnson, Kare E., «From Natural History to the Nuclear Shell Model : Chemical Thinking in the Work of Mayer, Haxel, Jenses, and Suess», Physics in Perspective 2 (2004): 22-34.
[22] Pycior, op. cit., 317.
[23] Par rapport à la contribution de cette savante à la science, voir : Kademani, B.S., V.L. Kalyane, and Sureshi Jange, «Scientometric Portrait of Nobel Laureate Dorothy Crowfoot Hodgkin», Scientometrics 45.2 (1999) : 233-250.
[24] Hussenius, Anita and Kathryn Scantlebury, «Witches, Alchemists, Poisoners and Scientists», In Chiu, M.-H., P. J. Gilmer and D. F. Treagust (eds.), Celebrating the 100th Anniversary of Madame Marie Sklodowska Curie’s Nobel Prize in Chemistry, Rotterdam, Sense Publishers, 2011, 191-2014.
[25] Sur le parcours de Barbara McClintock, voir : Shah, Esha, «A Tale of Two Biographies: The Myth and Truth of Barbara McClintock», History and Philosophy of the Life Sciences 38.18 (2016), 3 mai 2017; Comfort, Nathaniel, The Tangled Field: Barbara McClintock’s search for the Patterns of Genetic Control, Cambridge, Harvard University Press, 2001; Fox Keller, Evelyn, A Feeling for the Organism: The Life and Work of Barbara McClintock, New York, W. H. Freeman.
[26] May, Ann Mari and Gale Summerfeld. «Creating a Space where Gender Matters: Elinor Ostrom (1933-2012) talks with Anna Mari May and Gale Summerfield», Feminist Economics 18.4 (2012): 25-37.
[27] Krebs, Ronald R. «The False Promise of the Nobel Peace Prize», Political Science Quarterly 124.4 (2009): 593-625.
[28] Hedin, Op. cit., p. 62.
[29] Øyvind Tønnesson, «Controversies and Criticisms», www.nobelprize.org
[30] À ce sujet, voir : Benjamin, L.T., «Bahavioral Science and the Nobel Prize. A History», American Psychologist, vol. 58, n° 9, 2003, p. 731-741; Björk, R., «Inside the Nobel Committee on Medecine: Prize Competition Procedures 1901-1950 and the Fate of Carl Neuberg», Minerva, n° 39, 2001, p. 393-408; Charlton, B. G., «Which are the best nations and institutions for revolutionary science 1987-2006? Analysis using a combined metric of Nobel prizes, Fields medals, Lasker awards and Turing awards (NFLT metric)», Medical Hypotheses, vol. 68, n° 6, 2007, p. 1191-1194; Lindahl, B. I. B., «Discovery, theory change, and the Nobel-Prize: On the mechanisms of scientific evolution. An introduction», Theoretical Medicine, vol. 13, n° 2, 1992, p. 97-116; Rodríguez-Navarro, A., «Measuring research excellence. Number of Nobel Prize achievements versus conventional bibliometric indicators», Journal of Documentation, vol. 67, n° 4, 2011, p. 582-600.
[31 Garfield, E., «The 100 Most-Cited Authors of 20th Century Literature. Can Citation Data Forecast the Nobel Prize in Literature?», Essays of an Information Scientist 4 (1979-80). 363-369.
[32] Ferrer, Carolina. «Le prix Nobel de littérature à l’ère du numérique : internationalité du prix et réception critique des œuvres des lauréats», Inter-Lignes : Que sont les prix Nobel devenus? 10 (2013) : 13-35.
[33] Bourdieu, Pierre. Les règles de l'art. Genèse et structure du champ littéraire. Paris : Seuil, 1992.
[34] Price, Derek John de Solla. Little Science, Big Science. New York: Columbia University Press, 1963.
[35] Ferrer, Carolina. «El boom hispanoamericano: del texto a la pantalla», In Nuevas aproximaciones al cine hispánico: Migraciones temporales, textuales y étnicas en el bicentenario de las independencias iberoamericanas (1810-2010), Florida International University, Barcelona : Promociones y Publicaciones Universitarias, 2011, 79-101.
[36] Modern Language International Bibliography, www.mla.org
[37] Rodríguez, Regina y Soledad Fariña (eds.), Una palabra cómplice: Encuentro con Gabriela Mistral, Isis International 12 (1989).
[38] Smith, Rowland (ed.), Critical Essays on Nadine Gordimer, Boston, G. K. Hall, 1990.
[39] King, Bruce (ed.), The Later Fiction of Nadine Gordimer, London, Palgrave Macmillan, 1993.
[40] Fletcher, Pauline (ed.) Black/White Writing: Essays on South African Literature, Bucknell Review 37.1 (1993).
[41] Ferrer, Op. cit., p. 32.
[42] Konzett, Matthias Piccolruaz and Margarete Lamb-Faffelberger (eds.), Elfriede Jelinek: Writing Women, Nation, and Identity, Madison, NJ: Fairleigh Dickinson UP, 2007.
Gutjahr, Ortrud (ed.), Ulrike Maria Stuart von Elfriede Jelinek, Würzburg, Königshausen & Neumann, 2007.
[43] Durantaye, Leland de la, «On Cynicism. Dogs, Hair, Elfriede Jelinek and the Nobel Prize», Harvard Review 29 (2005): 146-153, p. 147.
[44] Corngold, Stanley, op. cit.
[47] Nous ne nous attarderons pas sur les sources et les conséquences de cette discrimination, sujet sur lequel il existe plusieurs recherches. En particulier, voir : Cole, Jonathan R., Fair Science. Women in the Scientific Community, New York, Columbia University Press, 1987; Keller, Evelyn Fox, Reflections on Gender and Science, New Haven, Yale University Press, 1985; Kirkup, Gill and Laurie Smith Keller (eds.), Inventing Women. Science, Technology and Gender, Cambridge, Polity Press, 1992; Reskin, Barbara F., «Sex Differentiation and the Social Organization of Science», Sociological Inquiry 48.3-4 (1978): 6-37
Zinsser, Judith P., «Imagining Patterns of Learned Culture: A Cross-Cultural View», Gender & History 26.1 (2014): 5-22.
[48]Les données furent obtenues des archives du site du prix Nobel : "Nomination Archive. Explore the nomination databases in Physics, Chemistry, Physiology or Medicine, Literature and Peace". Nobelprize.org. Nobel Media AB 2014. Web. 30 Apr 2017. www.nobelprize.org
[49] Après vérification des données, nous avons constaté des divergences entre les chiffres compilés comme résultat de nos requêtes par discipline et par personne, et les chiffres totaux publiés dans www.nobelprize.org, tel que nous les avons reproduits dans le Tableau n°11 et le Graphique n°15. Il s’agirait de différences provoquées par la façon de compter les nominations multiples. À ce sujet, voir : www.nobelprize.org.
[50] Sartori, Éric, Histoire des femmes scientifiques de l’Antiquité au XXe siècle. Les filles d’Hypatie, Paris, Plon, 2006, p. 327. Voir aussi : Sime, Ruth Lewin, Lise Meitner : A Life in Physics, Berkeley, University of California Press, 1996.
[51]À ce sujet, voir : Frize, Monique, The Bold and the Brave. A History of Women in Science and Engineering, Ottawa, University of Ottawa Press, 2009; Hubbard, Ruth, «Science, Power, Gender: How DNA Became the Book of Life», Journal of Women in Culture and Society 28.3 (2203): 791-799;Maddox, Brenda, Rosalind Franklin: The Dark Lady of DNA, New York, Harper Collins, 2002; Rapoport, Sarah, «Rosalind Franklin: Unsung Hero of the DNA Revolution», The History Teacher 36.1 (2002): 116-127; Uberoi, C. «Rosalind Franklin: The Woman Scientist of DNA», Resonance –Journal of Science Education 9.3 (2004), 3-5; Zwart, Hub, «The Third Man: Comparative Analysis of a Science Autobiography and a Cinema Classic as Windows into Post-war Life Sciences Research», History and Philosophy of the Life Sciences 37.4 (2015): 382-412.
[52] «Nobel Prize Awarded Women», Op. cit.
[53] Sohlman, Ragnar, Op. cit., p.110.
[54] Marika Hedin, Op. cit.
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