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  • Scritture di sé in sofferenza
    Orazio Maria Valastro (a cura di)

    M@gm@ vol.8 n.1 Gennaio-Aprile 2010

    «ROMANS DU MOI»: QUAND LES MAUX FONT SIGNE


    Marie-Camille Tomasi

    tomasi@univ-corse.fr
    Doctorante en Littératures et Civilisations Comparées au sein de l’Université de Corse, en co-direction avec l’Université Stendhal de Grenoble III, sujet de thèse: «De la quête identitaire au «roman du moi» ou l’insolite transmission d’un double héritage, dans les œuvres de James Joyce et Henry Bauchau»; Professeur vacataire de français dans le secondaire; Master en Littérature française générale au sein de l’Université de Corse Pasquale Paoli (2007) avec pour sujet de mémoire «le fantasme amoureux au miroir de l’imaginaire dans l’œuvre romanesque d’Aragon».

    Des mémoires aux journaux, de l’autobiographie à l’autofiction, les genres se croisent et parfois se confondent qui placent l’être et sa formation au centre de leurs lignes. Qu’elle soit la trame affichée du texte en devenir ou qu’elle innerve seulement le récit de ses incises ponctuelles, la «tentation ontologique» diffuse donc son aura, permettant à l’écrivain de revisiter son existence factuelle à l’aune d’une narration décentrée. Une tentation qui, revendiquée ou non, s’approche parfois de la volonté de puissance dans la mesure où sous couvert de neutralité, tout «écrivain du moi» est avant tout un «romancier» et que tout sujet mis en scène est avant tout personnage: la personne réelle cédant ici son image propre pour souscrire aux droits imprescriptibles du récit. L’auteur, institué créateur (avec tout ce qu’un tel terme peut avoir de résonances bibliques), s’arroge ainsi le droit de contempler ce monde qui est le sien et duquel il se détache pourtant. Dans la mesure où (s’)écrire c’est aussi se regarder, l’auteur, soumis aux miroitements narcissiques, s’expose donc sans cesse au risque de se perdre bien plus qu’il ne se retrouve dans ce processus annihilant d’auto-contemplation. Pour éviter qu’elle ne s’enlise dans les miasmes de ce que ce «moi» peut avoir d’haïssable, l’écriture doit alors s’explorer, exploser et se faire «autre» pour que se dresse, face à une quête de soi, solipsiste et solitaire, la découverte de l’altérité régénératrice. En effet, pour que l’image puisse être signifiante, le miroir doit se faire seuil afin que le sujet ne soit plus simple reflet mais individu à part entière qui, par le bris symbolique de la vitre sans tain, accède enfin à l’univers désenclavé qu’est celui de la mythification personnelle et au coeur duquel l’Un parviendrait à se (re)créer au miroir du Tout.

    Parce que toute mise en mots nécessite la double impulsion de l’intangible et du concret, le recours à l’écriture - à «l’écriture de soi» tout particulièrement - peut alors se percevoir comme la mise à jour de l’ambiguïté foncière de qui la porte. Mise à jour ontologique évidemment, mais encore symbolique, fabuleuse et fantasmatique en ce que, dans le même temps, l’écrivant se met à mort et renaît, auto-projeté dans l’espace cultuel du livre en construction. La mise au monde narrative serait donc l’aboutissement, parfois brutal, d’une gestation séculaire dont la seule issue semble être la plongée dans la brèche béante offerte par le couperet du texte. L’écrivain s’y engouffre, au risque de s’y noyer, entraînant à sa suite le Verbe symbolique dont il a hérité autant que les maux dont il se nourrit. Une fois incorporés, hantises personnelles et symboles latents tissent ainsi la trame de cette «fable de l’être» que toute œuvre porte en elle et sur laquelle viendront se greffer les fantasmes sublimés de l’artiste démiurge. Cette explosion herméneutique, seul le recours au mythe semble à même de l’accomplir puisqu’issus «du temps fabuleux des commencements» [1], les récits ainsi offerts englobent l’être singulier dans une démarche globalisante au sein de laquelle la blessure originelle parvient enfin à s’exprimer, relayée et alimentée par le chœur des ces voix en souffrance d’identité. Parce que le passage de l’oralité primitive à la textualité scripturale nécessite un décentrement de la parole originaire, la blessure s’ouvre alors et se redouble: à la liberté du verbe chanté se substituent les limites du texte écrit, répétant et explorant ainsi la douloureuse transmission d’un «moi» tourné vers le «nous». En réponse, le support narratif doit alors «s’altérer» à son tour, en ce qu’il lui faut se faire autre et se démultiplier afin que le mythe puisse devenir «personnel» et la quête trouver sa voie.

    Dès lors, si l’«écriture de soi» semble ne pouvoir s’affranchir du poids de l’imaginaire, ne serait-il pas envisageable de condenser en une narration singulière les influences obliques de «l’écriture» communautaire et du «moi» particulier? Ne pourrait-on pas en effet envisager une nouvelle forme de révélation textuelle au cœur de laquelle convergeraient auteur, narrateur et personnages, tous portés par les flots d’une conscience individuelle qu’alimente pourtant la dot symbolique d’une imagination activement sollicitée? Structure hybride par excellence, intriquant jusqu’à les confondre les plans réels, symboliques et (auto)référentiels, cette catégorie ainsi définie pourrait, dans une certaine mesure, concilier les aspirations antithétiques du romancier et de l’autobiographe au sein d’un genre en perpétuelle mutation. Genre qui, synthétisé sous l’appellation duelle de «roman du moi», pourrait se situer dans l’une de ces «cases aveugles» [2] que Philippe Lejeune réserve aux livres-Protée. Parce qu’il condense à la fois intime et public, réel et fictionnel, celui-ci rendrait ainsi possible le dévoilement interne précédant à toute narration. Le sujet narré n’y étant jamais véritablement celui qu’il y paraît, le texte oscille sans cesse entre la personne de chair qu’est l’auteur et les personna immatérielles qu’incarnent les personnages. Différent en cela de l’autofiction qui recentre le sujet réel au cœur d’un univers fantasmé autant que de l’autobiographie pour qui ne vaut que la réalité la plus concrète, cette nouvelle mise à nu scripturale appelle et permet l’immergence du réseau fluctuant de mythes et images qui tout à la fois motive et innerve la prise de parole. Une prise de parole qui puise son origine à la source de la souffrance fondamentale: celle à partir de quoi l’homme est confronté à l’inquiétante étrangeté du monde et de l’autre, perçus comme autant de fragments difractés de cette identité qu’à tout prix il lui faut reconquérir. Cette poétique de l’oscillation, Henry Bauchau semble en avoir saisi toute la puissance évocatoire. En effet, qu’il s’agisse de la descente du narrateur proprement «déchiré» dans les tréfonds de la parole sibylline ou de l’étrange errance d’un nouvel Œdipe, cheminant sur les routes d’une Grèce réinventée au rythme du récit se déroulant, l’auteur semble avoir fait de la transposition mythique le medium privilégié de l’herméneutique textuelle.

    Parce qu’à toute délivrance préexiste une souffrance (subie ou désirée, assumée ou refoulée …), la mise au monde scripturale peut alors s’envisager au regard de la blessure dont elle découle. Une blessure qui, pour faire sens, demande à être exprimée jusqu’à la lie et non pas suturée, dans la mesure où c’est précisément dans la crue langagière que bien souvent l’être se forme. Cette souffrance fédératrice, le «roman du moi» la revendique d’ailleurs pleinement, au point d’en faire la pierre angulaire de toute son architecture. Entre ses lignes, celle-ci acquiert valeur de véritable ferment fondateur. Le texte entier en est imprégné: dans les choix thématiques évidement qui exposent et subliment la formation ontologique du narrateur au regard de l’épanchement des maux dans l’œuvre, du point de vue symbolique également puisque les doubles narratifs se dressent comme autant de figures tutélaires d’une douleur assumée, mais encore du point de vue purement stylistique, dans la mesure où la langue elle-même y est parfois malmenée, tailladée, éclatée à l’image du corps des textes, dont l’unité même trouve sa source dans cette poétique de la blessure, faite de brisures et de liens, de soubresauts et repos.

    Ainsi envisagée, la souffrance serait donc cette impulsion primaire de qui le texte naît. A travers elle se lisent la vie et la fable, l’auteur et ses doubles. L’écriture elle-même se fait métonymie d’une œuvre-transfert: celle qui, à la suite des Sibylles et autres participants d’une écriture toujours «à l’écoute» [3], prend en charge les maux pour qu’ils ne représentent plus mais signifient enfin. Bien plus qu’une simple «auto-bio-graphie», l’écriture de soi serait donc ce qui, au-delà du simple récit de vie, permet la gestation interprétative. Elle matérialise en quelque sorte ce stade intermédiaire de la parole où, les mots n’étant pas encore proférés, le sens affleure et se dissout. A la fois aboutissement (parce que la voix est sur le point de s’affirmer) et suspens (puisque qu’elle hésite encore à investir l’espace béant du texte à produire), elle participe d’un processus de création ambivalent car, si le texte à venir est déjà présent en arrière-plan, tout est pourtant à (ré)inventer.

    Et cette réappropriation est justement celle d’une parole en souffrance qui attendrait l’élément susceptible de l’exprimer: mouvement qui est précisément celui d’une écriture qui tout à la fois viderait de son suc la plaie trop longtemps exposée et en apaiserait les douleurs par le biais d’une mise en mots proprement cathartique.

    Dès lors le texte se fait à son tour actant de la reconquête identitaire. Il devient le speculum au regard duquel le moi s’esquisse, mais également la «barrière» symbolique derrière laquelle la douleur première s’estompe ou du moins se dilue, égarée dans la «forêt» de ces «hommes doubles» [4] à la naissance desquels elle a intimement contribué.

    La mise en mots ouvre alors sur la mise en scène de ce moi qui éclot et dans laquelle l’exposition des souffrances endurées s’affirme comme revendication et justification de la prise de parole. La blessure elle-même se voit alors réhabilitée puisqu’à travers elle se réconcilient les deux pôles du symbole brisé.

    Si l’on considère que toute prose naît de la blessure qui l’inspire, qui mieux que Bauchau pourrait alors illustrer l’impulsion créative des souffrances en latence? Celui pour qui l’œuvre semble se concevoir, au fil des divers bouleversements jalonnant l’existence réelle, comme un véritable espace matriciel apparaît ainsi à bien des égards comme le représentant de ce désir paradoxal de renaissance morbide dans la mesure où la délivrance ne s’accomplit jamais que dans la souffrance. Né de cette fascination pour un mal qui entrave autant qu’il libère, l’univers bauchaldien apparaît alors comme le point focal de toute une métaphore ontologique, issue de la parole en suspens et tendant vers son épiphanie signifiante.

    Le premier roman au titre évocateur retrace en effet le long cheminement qui, de l’agonie de la mère à l’apogée de la Sibylle, a marqué les jours de l’écrivain en devenir. La bien nommée Déchirure est donc avant tout celle que le narrateur doit opérer pour que de la rupture jaillisse le Verbe. Roman de la mère mourante et berceau de la maïeutique auctoriale, cette œuvre se dresse en effet comme la légitimation de la blessure originaire autant que sa sublimation.

    «Je pense à mon livre abandonné chez moi. Voilà un an qu’il est commencé et il progresse, malgré moi, dans plusieurs directions, sans avoir trouvé de centre. Parfois je le sens tout proche, mais sans pouvoir le faire sortir de l’obscurité, d’où il me guide peut-être. Je suis entré dans ce livre à l’aveuglette, pressé sans doute par le besoin de me retrouver à la naissance de la parole, dans la déchirure de l’enfance, dans le creux, dans la faille, en tout cas dans l’endroit béant où je suis descendu avec la Sibylle. Avec lui, je suis revenu sur le lieu du drame, j’ai été tout de suite submergé. Comme je le suis aujourd’hui par la maladie de maman qui produit cette grande confusion, où, plus qu’ailleurs, je la découvre en me retrouvant.» [5]

    Submergé par l’univers de l’enfance et de ses hantises [6], l’auteur effectue dès les premières lignes une douloureuse plongée en lui-même; une plongée qui se place d’ailleurs d’emblée sous le signe de la violence ou du moins de la soudaine brutalité du choc puisqu’«il y avait le mot attaque, si opposé en apparence à la réalité monotone de sa vie et qui m’atteignait moins par l’image du combat que par celle de l’agression et du feu» [7]. L’œuvre est donc immédiatement placée, malgré elle, malgré l’auteur lui-même, sinon sous le sceau de la blessure, sous l’empreinte du moins de la maladie ouvrant sur l’effrayant horizon de la mort «en souffrance». Une souffrance liminaire qui acquiert cependant au fil des pages un rôle véritablement ambigu, dans la mesure où elle ne s’applique pas directement à l’écrivain, mais contribue pourtant à la résurgence de ses maux (mots?) singuliers. Cette «chronique d’une mort annoncée» agit en effet sur Bauchau comme un véritable catalyseur puisque tout en l’immergeant dans les limbes d’un passé toujours déjà enfui, elle le renvoie du même coup face à lui-même: les craintes et les plaies du passé se mêlant intimement aux douleurs de ce «présent d’incertitude» [8] dans lequel elles trouveront enfin à s’exprimer. «Déchirure» et «attaque» inaugurent ainsi le parcours bauchaldien, plaçant les œuvres à venir dans l’orbe d’une double (re)conquête: la recherche diégétique du texte en construction alimentant et légitimant la réunification de l’être à (ré)inventer.

    Les mots seront donc les ouvriers de cette «destructuration» complète des bornes spatio-temporelles dans lesquelles ils se doivent pourtant de s’inscrire pour faire que de ce décentrement référentiel surgisse l’homme-texte dans toute sa vérité. Une fois mise à jour la plaie initiale, le champ est alors ouvert aux multiples réminiscences qui, toutes, viendront raviver une blessure antérieure: l’image horizontale de la mère couchée ranime ainsi le souvenir tenace de la verticalité passée, symbole de la distance et de la froideur maternelle; froideur qui à son tour renverra à la «maison froide» puis à la Grande Muraille, vecteur et creuset des angoisses en latence depuis l’enfance. Passés au crible de l’imaginaire scriptural, les éléments de l’arrière-plan «mythifiant» des souvenirs s’inscrivent dans une démarche de restauration qui laisse déjà présager les figures totémiques qui constitueront par la suite la lignée romanesque de l’auteur. Aussi, bien avant Œdipe et Antigone [9], avant Pierre et Johnson [10], apparaissent déjà les personnages transferts que sont Mérence et l’homme noir [11], mais également la Sibylle [12] déroutante, le Frère ennemi et le Grand-père patriarche. Les prémisses du «roman du moi» s’inscrivent ainsi dans les lignes de La Déchirure, puisant dans la brèche que celle-ci opère dans le tissu romanesque, la puissance évocatoire d’un langage dédoublé puisque multiple. En effet, la voix vacillante de la mère à l’agonie libère celles du fils décentré: à la crainte de l’enfant Bauchau se superposent alors les angoisses de l’adulte en instance d’analyse comme aux voix ténues du passé oppressant s’associent les appels lancinants d’un présent qui ne demande qu’à s’exprimer. Stratification signifiante qui s’étend d’ailleurs au jeu des repères spatio-temporels puisque le temps de la rédaction semble être dédoublé à son tour: à la fois co-référent à l’ancienneté des souvenirs et concomitant à l’actualité de la cure. De même, la perpétuelle oscillation entre les divers lieux de la formation ontologique et littéraire accentue et redouble le jeu entre les époques narrées et les moments de l’énonciation.

    Cette fuite en avant qu’opérerait le texte devenu relais de la cure semble ici pouvoir se lire à la fois comme la reconnaissance de la blessure initiale et son dépassement. Au fil des lignes, et bientôt au fil des œuvres, la plaie s’ouvre et se fait signe pour constituer la trame symbolique sur laquelle viendront s’inscrire les figures de l’auteur et de ses avatars de papier. Une volonté de diversion créatrice, que Bauchau revendique d’ailleurs pleinement dans le journal de l’œuvre qu’est La Grande Muraille:

    «Je veux aller vers autre chose, un peu d’équilibre, l’œuvre, la compréhension de moi-même. Tout ce que je n’atteins pas, que je n’atteindrai sans doute pas, qui est peut-être mythique. […] Il y a un élan que l’âge éteint et qui pourtant est encore en moi inassouvi. C’est dans l’œuvre que je devrais pouvoir projeter ce que je ne désire plus revivre. Là le « reviens avec tous tes supplices » peut encore avoir pour moi un sens qui ne soit pas gonflé, qui ne pousse pas à aller à contre-courant de la vie. Actuellement je ne suis pas déchiré par l’œuvre, je le suis par le temps, ce n’est pas la même chose.» [13]

    Le statut de l’œuvre comme objet thérapeutique transférentiel, à la fois moteur et creuset des hantises, semble alors indéniable, dans le même temps où la prégnance de la cure sur l’imaginaire devient plus palpable. L’annonce d’une mort prochaine fonctionne donc pour Bauchau comme un moteur d’écriture pour le moins paradoxal puisqu’elle entraîne dans son sillage une véritable volonté de vie. L’auteur, bien qu’intimement bouleversé par la perspective d’une perte essentiellement douloureuse, semble s’emparer de cette douleur, faire sienne l’agonie maternelle pour finalement la dépasser au regard d’un langage proprement démiurgique. Une fois la mère et ses symboles mis à mort, le texte peut enfin se réapproprier l’espace narratif en construction et y diffuser son aura individualisante. A la mort de la mère s’oppose ainsi la renaissance du fils effacé, autant qu’à la blessure symbolique d’une enfance brimée et comme en partie gommée [14], font face les affrontements sublimés de l’auteur aux prises avec son image:

    «C’est alors que j’ai été frappé. J’ai reçu le coup sur la tête, comme un bœuf. […] En pliant les genoux il me semble avoir vu un long corps de singe, très beau, vêtu d’une merveilleuse toison claire. D’une main il se tient à l’arbre. Quel arbre? L’arbre généalogique qu’il ébranle de son balancement, et de l’autre, il tient le maillet. […] Je vois […] le visage de l’autre, son front large et cuivré sous les puissants cheveux roux. Il est jeune, il danse, il bondit avec des poings superbes et parfois il saisit le maillet et il frappe.» [15]

    Réconciliés dans une unique prise de pouvoir, l’enracinement primordial aux origines parfois étouffantes autant que la violence salvatrice de la cure à laquelle le maillet renvoie implicitement offrent une vision parallèle du conflit latent. Conflit qui englobe tout à la fois la lutte interne et intestine du sujet face à lui-même autant que les efforts effrénés que celui-ci doit effectuer pour se désenclaver d’un passé qui le hante et triompher d’un futur qui l’effraie. A la plaie intime et solitaire se superposent ainsi les duels ontologiques que le temps de l’écrit, qui déchire et renoue l’être, rejoue et redouble infiniment. Chaque coup de ce maillet en qui se cristallisent individualité et atavisme, revendication du même et dangerosité de l’autre, tend alors à exhiber à la face de sa victime le speculum du texte défensif. L’auteur est certes marqué du sceau de la dualité, son être tiraillé entre les deux pôles d’une même quête, mais ce dédoublement semble également être la condition nécessaire pour que la souffrance solitaire se répande et prenne sens dans la maïeutique sublimée qu’est l’écriture de soi. Et si l’œuvre, lacérée par le stylet du langage retrouvé, se dresse à son tour comme une plaie béante, celle-ci n’est plus gouffre sans fond mais scène expiatoire sur laquelle «tous [l]es supplices» peuvent être «projetés» et recréés. La souffrance deviendrait donc tremplin à la sublimation artistique à travers laquelle le sujet «pensant» se mire et se construit au regard du «sujet narré» qui s’ébauche sous sa propre plume.

    «J’avais été terrassé et marqué. Pour la vie, et pour l’éternité s’il y en a une. J’étais abattu aux pieds de l’ennemi inconnu et il n’y avait plus de combat possible. C’est mon propre poids qui me retenait la face contre terre, le talon de l’adversaire n’était pas nécessaire. Peut-être ne l’avait-il jamais été. Si le salut était encore possible - et il devait l’être puisque somme toute je paraissais vivant - il ne pouvait plus venir que d’ailleurs et de l’autre. Il fallait de l’aide. Attendre. Pour cela les coups de maillet m’aidaient beaucoup.» [16]

    Venue de l’extérieur et infligée par soi et en soi, la blessure devient paradoxalement la marque de la singularité de qui l’accueille, elle n’est plus souffrance écrasante mais signe distinctif d’une unicité revendiquée et, en ce sens, n’est plus crainte mais souhaitée. Le maillet, métonymie de la souffrance liminaire, se dresse ainsi comme l’élément fédérateur de la démarche de l’écrivain: il blesse certes, mais il libère aussi puisque c’est grâce à lui que le sujet clivé se lance à la poursuite de l’«ailleurs et de l’autre». Ailleurs de l’horizon infiniment étendu du «livre à venir», autre de l’identité démultipliée de l’artiste démiurge qui tout à la fois se crée, renaît et enfante. Cette filiation imaginaire peut d’ailleurs se lire comme la source de la série d’«autofictions des origines» dont Bauchau s’est fait le hérault. En effet, du Régiment noir comme autobiographie doublement décentrée (puisqu’elle relate l’épopée imaginaire non pas de l’auteur, mais de la figure magnifiée d’un père par ailleurs fort peu présent dans l’univers romanesque) à la saga sublimée de la lignée oedipienne, l’espace bauchaldien paraît se définir par l’insolite condensation de la quête et de son objet dans la figure même des personnages tout ensemble héros et errants.

    La filiation romanesque développe alors et renforce l’intuition liminaire d’une souffrance prolifique parce que cathartique. Les récits semblent ainsi innervés, au-delà de la résurgence quasi-pulsionnelle des mêmes noyaux familiaux éclatés et reconstitués à l’infini, par un réseau souterrain de mythèmes latents parmi lesquels le thème de la douleur (volontaire ou non, consciente ou pas) creuse toujours plus profond ses sillons. Ainsi par exemple en va-t-il de la figure recentrée d’un Œdipe à la fois auteur et victime de la souffrance dont il découle. En effet, bien que nous ne le rencontrions qu’une fois la faute accomplie et la blessure consommée (blessure à envisager d’un point de vue symbolique comme celle faite à la femme, à la mère que l’inceste a touchée en son sein, mais également d’un point de vue purement physique comme celle de la mutilation d’un corps érigé en témoin saisissant d’un châtiment expiatoire volontairement infligé), le roi déchu semble se dresser comme la personnification criante de la douleur assumée. Cette passation symbolique du créateur à la créature érige le texte comme le lieu de l’accomplissement par excellence. A travers la transposition doloriste de l’auteur sur son personnage, puis du personnage sur sa propre lignée (on se souvient alors du magnifique cri poussé par Antigone esseulée, témoignant autant de son désespoir que de l’espérance en une révolution positive) [17], le roman se donne parfois lui-même comme une blessure. La structure même de l’œuvre fait donc sens en ce qu’elle est celle d’une plaie qui s’écoule jusqu’à n’être plus qu’un creuset productif: celui du mal exalté, celui encore de ces sanglots qui s’épanchent jusqu’à s’épuiser, sans pour autant se tarir puisqu’une fois les larmes séchées ce sont les mots qui prennent le relais. De la «déchirure» initiale à son épanchement sublimé, de l’auteur de chair aux personna de papier, de la représentation romanesque à l’interprétation diariste, l’édifice bauchaldien semble en effet se construire par stratifications successives, chacune portant en son sein le germe de la suivante. Et le récit, ainsi conçu, devient littéralement spéculaire (au sens où L. Dällenbach l’entend) [18]: il se réfléchit à l’infini, disséminant les figures des personnages comme autant de reflets de cette écriture diffuse au miroir de laquelle s’esquisse le portrait mouvant de l’auteur qui la porte.

    C’est au cœur de cette filiation précisément que se situe la création identitaire puisque le Moi auctorial s’y élabore au regard de la pluralité romanesque. La prise de parole s’échappe et dévie de son rôle premier de retranscription individuelle et «réaliste» pour se dupliquer et s’élargir à l’universalité des symboles convoqués. Ainsi Œdipe est-il tout à la fois enfant trouvé et roi déchu, auteur en souffrance et personnage en errance, tout comme Pierre est autant le père que le fils, le réel magnifié que l’imaginaire matérialisé. La mise en mots devient alors véritablement mise en scène au sein de laquelle le sujet multiplie ses représentations et, des origines du roman au récit des origines, la trame se tisse d’une généalogie fantasmée. Généalogie qui comprend alors naissance et reproduction: reproduction des types et schémas fondateurs, naissance d’un sujet original parce qu’originel. Cependant, si l’écriture de soi permet à son auteur de ressusciter à travers elle, elle le place toutefois dans une position particulièrement inconfortable dans la mesure où, ni tout à fait dépendant de l’histoire recréée, ni véritablement détaché de celle-ci, l’écrivain ne reconquiert son identité qu’au prix d’une solitude assumée. En effet, Sisyphe acculé aux bornes de sa propre création, l’auteur semble condamné à surplomber ses personnages sans totalement s’y mêler, tout comme il contemple sa vie au prisme de la création littéraire. Il appartient certes au réseau fantasmatique dans lequel son drame se rejoue sans cesse mais ne peut pourtant s’y intégrer pleinement dans la mesure où, en tant que créations, les personnages ne lui renvoient jamais qu’un reflet biaisé de lui-même. Se dresse alors le paradoxe fondamental de toute écriture «des profondeurs» puisque s’extraire de celle-ci revient bien souvent à se retirer hors de l’englobante altérité. Aussi, si la mise en mots se fait délivrance c’est d’abord à une mise au monde solitaire qu’elle ouvre. Solitude de l’auteur, en constant équilibre entre une existence qu’il ne perçoit plus telle qu’elle se déroule et une création qui, une fois mise au monde, s’en échappe littéralement. Solitude également du sujet en devenir: ni tout à fait départi de ce passé qu’il reconstruit, ni pour autant réellement engagé dans l’avenir à conquérir. Reste le présent et son lot d’incertitudes. Or, dans ce même présent une mise au ban subsiste: celle du langage qui érige à la fois l’horizon de ses possibles et la finitude de ses bornes. En effet cette langue même dont il fait la clef de sa délivrance, ne lui appartient pas en propre et si elle participe bien de la construction identitaire du couple auteur/personnages, il n’en demeure pas moins que tous les «à venir» romanesques ne se dessinent jamais que sur les bords d’un verbe purement utopique. Aussi, la solitude bauchaldienne tient-elle essentiellement à ce que l’auteur, sans cesse ex-ilé dans la péninsule narrative, se situe nécessairement aux confins de son œuvre et du langage, «[…] ni en lui, ni hors de lui, sur la ligne introuvable de sa côte […]» [19]. Et Bauchau pourrait alors prendre à son compte les quelques mots de Derrida:

    «Mais avant tout et de surcroît, voici le double tranchant d’une lame aiguë que je voulais te confier sans mot dire, je souffre et jouis de ceci que je te dis dans notre langue dite commune: ‘Oui, je n’ai qu’une seule langue, or ce n’est pas la mienne’.» [20]

    Or, si cette langue n’est pas sienne, c’est précisément parce qu’elle est «commune» et qu’elle permet donc d’ouvrir sur l’échange qu’appellent avec force l’ailleurs et l’autre précédemment évoqués. Le rapport au texte et à sa solitude tendrait donc à s’inverser grâce à l’outil même de l’exil. En effet, si le fruit de l’auto-maïeutique auctoriale est bien solitaire, (puisque délaissant l’atavisme biologique, c’est seul que l’auteur se fait renaître au travers de son œuvre) cet enfantement ouvre malgré tout sur l’espace de l’altérité à apprivoiser. La renaissance se fait de soi à soi pour finalement déboucher sur le monde et appeler l’autre à explorer cet univers d’abord singulier. Ainsi, si la blessure originelle se perpétue dans le double lignage bauchaldien, elle ne revêt plus l’aspect maléfique hérité de la trilogie oedipienne, mais semble au contraire ouvrir sur l’altérité reconstructrice. De même, la béance primordiale instaurée par la sur-présence de la mère et l’absence renouvelée du père débouche-t-elle sur une oeuvre en spirales et circonvolutions qui, si elle n’aboutit pas sur la plénitude absolue semble toutefois ouvrir la porte du salut puisqu’en son sein, le dépassement des maux de l’existence réelle s’opère par le pouvoir thérapeutique des mots «rédempteur».

    «Il faut peut être expliquer que j’écris pour guérir, pour trouver, pour me retrouver et retrouver les autres. La guérison: par là on communie avec les autres, avec le monde qui se crée, j’ai l’air de ne m’occuper que de moi-même mais je suis avec tout ce qui lutte pour défaire les vieilles barrières et édifier un monde nouveau.» [21]

    La mise en scène cède ainsi le pas à la mise en relation et offre sa solitude à la lecture conjointe du même et de l’autre, cristallisés dans la figure d’un lecteur idéal, aussi «autre» que «moi». Le recours à une tierce instance, excentrée elle aussi du paysage narratif mais y participant pourtant, (en ce que tout texte tend à être lu, toute écriture à être comprise dans une démarche globalisante d’appropriation et de dessaisissement de l’objet-livre qu’elle exalte et convoite), libère la souffrance initiale de tout ce qu’elle pouvait conserver d’annihilant. A travers la confrontation du moi isolé et de l’altérité expiatoire, le texte redessine ses contours: il n’est plus seulement le dépositaire des plaintes d’un individu esseulé et comme éthéré de n’être pas entendu, mais se fait le témoin vivant de la revendication identitaire.

    «Ecrire le moi, c’est affirmer son existence, céder à sa fascination, car il serait inutile de faire écriture d’une réalité inexistante. Mais, si l’on écrit du moi, c’est que cette réalité est problématique ; la rédaction doit contribuer à la concrétiser, à lui donner une consistance dont elle est apparemment dépourvue.» [22]

    Cette consistance, c’est le texte et ses rejetons fictionnels qui semblent alors principalement l’offrir. Puisque toute «écriture du moi» se veut mise en scène scripturale d’un sujet réel, elle semble devoir assurer à l’être ainsi déterminé une existence (à la fois impalpable et matérielle, ponctuelle et pérenne) qui bien que récréée de toutes pièces n’en demeure pas moins essentielle. Aussi, bien plus qu’ils ne donnent à voir le fidèle reflet d’un Moi figé dans sa propre représentation, les récits bauchaldiens décentrent les miroirs, offrant ainsi une image brouillée dont les lignes de fuite constituent la meilleure interprétation. Les diverses personna citées à comparaître constituent donc moins un masque narratif qu’un condensé existentiel tendant à doter la réalité existante d’une puissance évocatoire par laquelle le fictionnel concrétiserait l’effectif.

    Parce que le roman du moi en tant qu’espace d’expression de l’intime, est également l’espace du dialogue renoué (avec soi-même bien sûr, mais encore avec le lecteur - idéal ou effectif -, avec le monde également dont il est issu et dans lequel il se replace), la blessure semble peu à peu cicatriser et faire de la plaie, non plus une entaille séparatrice, mais l’objet de la compassion sincère; le retour sur soi permettant alors l’émergence d’autrui dans l’écriture du moi. Une fois instauré, ce dialogue (conscient ou non, désiré ou reconstruit) conditionne le rapport de l’auteur et de ses représentations en ce qu’elles participent pleinement du processus de construction identitaire, instituant au fil des entrées symboliques, la figure dévoilée de l’écrivain comme pierre d’achoppement de texte. Le dépassement de la solitude tiendrait donc aussi à la relation que le créateur entretient avec son œuvre, non plus perçue en tant que vivier prolifique de transferts ontologiques mais érigée comme le symbole lui-même, celui par qui l’étranger se fait ami et la différence source de la reconnaissance.

    Dès lors si l’on «peut vivre dans la déchirure. On peut très bien» [23], le texte à son tour peut très bien vivre dans l’orbe de la souffrance qui l’a engendré. Bien plus, il semble s’en alimenter, y puiser «le mystique aliment qui [fait] sa vigueur» [24]. Les mots, rythmes et sons s’y font les marqueurs de la blessure fondatrice et le récit recueille dans un même élan personnes et personnages, témoignages et inventions. L’œuvre bauchaldienne dans son entier est donc bien celle de la rupture, de l’entaille signifiante, effectuée et réinvestie, dans le texte comme dans la vie; d’une entaille également qui contient et exploite toutes les polarités de la souffrance magnifiée dans la réunification, revendiquant ainsi le statut paradoxal d’une parole profondément symbolique en ce qu’elle ne prend sens qu’une fois réunis les deux pôles égarés du simbolon éclaté:

    «L’esprit de réconciliation m’anime mais la déchirure existe et ce ne sera que lorsqu’elle aura exprimé tout son pus et toute sa fureur que la réconciliation sera possible.» [25]

    Si une telle conception du texte comme symbole et faire-valoir d’une douleur secrète et primordiale peut paraître déroutante, il n’en demeure pas moins que c’est dans cet écart même qu’elle puise toute sa force évocatoire. Le texte, mis à jour comme on met au monde, s’élabore donc tout au long du processus gestationnel qui est celui de tout «romancier du moi» dans un perpétuel balancement entre souffrance et délivrance, introspection et dissémination. L’écriture, comme processus intrinsèquement matriciel, se dresse ainsi comme le lieu de résolution de ces conflits latents qu’elle génère, couve et apaise tout à la fois. Théâtre de l’être à renaître et du temps fécondant, des métamorphoses du réel et de l’invention fictionnelle, du verbe enfin et de ses destinataires, la prose bauchaldienne se fait le lieu d’une reconquête qui n’est plus seulement personnelle mais universelle, et se propose de lire l’homme et ses symboles au regard du monde et de ses mythes. En ceci, la langue chez Bauchau est-elle essentiellement féminine puisque tour à tour femme, mère, sœur et amante, elle porte en son sein les fruits d’or de la création. Et les figures de l’éternel féminin de s’élever alors comme autant de cariatides d’une écriture toujours en souffrance parce que sans cesse enfantant. D’Antigone à Mérence, de Jocaste à la Sibylle, toutes transforment et rénovent, rehaussent et enfouissent dans une courbe sans fin les éternels descendants de la voix originaire que constituent l’auteur et ses doubles.

    «Ainsi le temps nous fait l’un pour l’autre Antigone
    Non point l’âge mais l’âme en quête du royaume
    Et des genoux puissants de mère en beauté jeune
    Pierres transfigurées, broyées dans la genèse
    Mérence du futur, de la tendre lumière
    De l’âme qui l’invente est-elle imaginaire,
    Est-elle la statue de l’âme toute en psaumes
    Toute en larmes d’enfant, toute entière en royaumes
    Vers laquelle il faudra descendre à reculons
    S’enfoncer par la voix profonde, les passions,
    Dans ce que murmurait la langue originaire.» [26]

    Notes

    1] M. Eliade, Aspects du mythe, Paris, Gallimard, «Folio Essais», 1963, p. 16.
    2] P. Lejeune, Le pacte autobiographique, Paris, Seuil, Points «Essais», 1975, réed. 1996, p. 31.
    3] H. Bauchau, L’écriture à l’écoute (textes réunis et présentés par Isabelle Gabolde), Arles, Actes Sud, 2000.
    4] L. Aragon, La mise à mort, Gallimard, « Folio », Paris, 1965, p. 99.
    5] H. Bauchau, : H. Bauchau, La Déchirure, Actes Sud, Arles, 2003, pp. 83-84. Nous soulignons.
    6] «L’image de la mère couchée a été ranimée après tant d’années par un coup de téléphone au petit jour: Maman a eu une attaque» Ibid, p. 12.
    7] Ibid, p. 13.
    8] H. Bauchau, Le présent d’incertitude, Journal 2002-2003, Paris, Actes Sud, 2007.
    9] Personnages éponymes de deux des œuvres clefs de l’univers romanesque bauchaldien dans lesquelles l’errance oedipienne prend le relais de la quête auctoriale.
    10] Personnages du Régiment noir. Pierre est la transposition fantasmée du père de l’auteur, projeté dans l’univers manichéen d’une guerre de Sécession pour le moins allégorique. Johnson est quant à lui un soldat noir avec lequel Pierre accomplira son initiation sur la route menant du nord vers le sud, de soi vers l’autre.
    11] Figure maternelle de substitution, née de l’imagination de l’enfant Bauchau, Mérence apparaît pour la première fois dans les lignes de La Déchirure (dans le cadre de la cure entreprise par l’auteur) et se retrouvera par la suite, disséminée dans plusieurs écrits (dont Le Régiment noir). L’homme noir cristallise quant à lui les aspirations antithétique de l’auteur, perpétuellement «déchiré» entre les deux pôles de son existence (tant réelle que romanesque).
    12] La Sibylle est le surnom (éminemment signifiant) que Bauchau a attribué à sa psychanalyste: Blanche Reverchon-Jouve.
    13] H. Bauchau, La Déchirure, op.cit, p. 124.
    14] «L’enfance était submergée, avec les cités du désir, englouties dans la longue attente. […] Et voici que l’enfance est finie aux yeux de tous, alors que l’enfant est encore là tout entier, tel qu’il a été marqué par les dures années sous-marines», Ibid, p. 31.
    15] Ibid, p. 23. Nous soulignons.
    16] Ibid, p. 24.
    17] H. Bauchau, Antigone, Paris, J’ai lu, 2007, pp. 171-173.
    18] L. Dällenbach, Le récit spéculaire. Essai sur la mise en abyme, Paris, Seuil, «Poétique», 1977.
    19] J. Derrida, Le monolinguisme de l’autre, Paris, Galilée, «Incises», 1996, p.14.
    20] J. Derrida, op.cit, p. 15, cité in O. Ammour-Mayeur, Henry Bauchau, une écriture en résistance, Paris, L’Harmattan, «Structures et pouvoirs des imaginaires», 2006, p. 169.
    21] H. Bauchau, La grande muraille. Journal de la Déchirure (1960-1965), op.cit, p. 49.
    22] G. Gusdorf, Lignes de vie 1. Les écritures du moi, Paris, Odile Jacob, 1991.
    23] H. Bauchau, La Déchirure, op.cit, épigramme, p. 13.
    24] C. Baudelaire, «L’ennemi», in Les Fleurs du mal, Paris, GF Flammarion, 1991, p. 67.
    25] H. Bauchau, La grande muraille. Journal de la Déchirure (1960-1965), Actes Sud, «Babel», Arles, 2005, p. 60.
    26] H. Bauchau, «Les deux Antigone», in Poésie, Arles, Actes Sud, 1986, p. 237.


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